La qualification juridique du médium jeu vidéo est une vaste question à laquelle aucune réponse définitive n'a jamais été donnée ni par la jurisprudence, ni par la doctrine et encore par la loi. Comme le code de la propriété intellectuelle ne dispose aucune qualification spécifique concernant le jeu vidéo, c'est aux praticiens et donc aux juges lorsque la question leur est posée, d'en proposer une.
Le choix est alors le suivant :
- soit conférer au jeu vidéo une qualification unitaire : œuvre audiovisuelle (donc de collaboration) ou logiciel (œuvre collective), solution simple et sécurisante ;
- soit éclater les différentes composantes de cette œuvre complexe qu'est le jeu vidéo et donner à chacune la qualification qui leur convient, solution plus originale et réaliste.
Selon les décisions, telle ou telle qualification est retenue. Ainsi en 1999, la Cour d'appel de Versailles avait qualifié le jeu vidéo d'œuvre collective. Puis en 2004, dans une approche radicalement inverse, la Cour d'appel de Paris décide de qualifier le jeu vidéo d'œuvre de collaboration. Selon la qualification choisie, le régime diffère complètement.
Dans un récent arrêt du 20 septembre 2007, la Cour d'appel de Paris, en délaissant les qualifications unitaires possibles, opte pour la solution originale : la qualification distributive (ou pluraliste) du jeu vidéo.
Le litige, qui avait pour objet l'introduction de musiques dans des jeux édités par la société CRYO, portait sur la question de savoir si l'introduction sans autorisation préalable et sans paiement des droits à la société SESAM, société de gestion collective des droits d'auteurs d'œuvres multimédia, portait ou non atteinte aux droits d'auteur de celle-ci.
La réponse à cette question dépend bien entendu de la qualification donnée au jeu vidéo.
La société CRYO soutenait que le jeu était une œuvre collective, c'est-à-dire selon l'article L. 113-2 du CPI : « l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé ».
Deux façons de prouver qu'une œuvre est collective : soit elle l'est réputé de droit , soit son mode d'élaboration répond à la définition légale.
Un logiciel étant de par la loi une œuvre collective, la tentation est grande de réduire un jeu vidéo à sa composante logicielle. Mais selon la Cour d'appel "une telle qualification apparaît bien réductrice alors que, s’il est exact que le jeu vidéo comprend un tel outil, il s’agit d’une œuvre de l’esprit complexe élaborée au moyen de cet outil avec un scénario, des images, des sons, des compositions musicales, etc. ; que les dispositions de l’article L. 131-4 5 du Code de la propriété intellectuelle ne sont donc pas applicables, les jeux vidéo édités par la société CRYO étant des œuvres “multimédia” qui ne se réduisent pas au logiciel qui permet leur exécution".
"Complexe", le mot est lâché et conséquence immédiate : le régime du logiciel ne peut englober la complexité artistique d'un jeu vidéo.
Secundo, le mode d'élaboration du jeu vidéo ne répond pas non plus à la définition légale de l'œuvre collective. Pour la Cour d'appel, " les droits de reproduction revendiqués par la société SESAM portent sur les compositions musicales des adhérents de la SACEM en tant qu’elles sont reproduites dans un programme multimedia, qu’en effet la musique ne se fond pas dans l’ensemble que constitue le jeu video, qu’il reste possible d’attribuer au compositeur ses droits d’auteur distincts sur cette œuvre qui, par rapport à ce dernier, est une œuvre de collaboration au sens des articles L. 113-2 et L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle".
Ainsi, comme la fusion de la musique dans l'œuvre n'est pas constatée, c'est le régime général des œuvres plurales qui doit être appliqué : le régime de l'œuvre de collaboration régi par l'article L 113-3 du CPI : "L’œuvre de collaboration est la propriété commune des coauteurs. Les coauteurs doivent exercer leurs droits d’un commun accord, chaque auteur partage donc les droits sur l’œuvre finale; toutefois lorsque la contribution des auteurs relève de genres différents, chaque coauteur peut, sauf convention contraire, exploiter séparément sa propre contribution à condition de ne pas porter préjudice à l’exploitation de l’œuvre commune".
Par conséquent, l'autorisation préalable pour l'utilisation de musiques doit être demandée à l'ayant-droit, en l'espèce la SESAM.
Pour conclure, on peut s'interroger sur les réponses apportées à la question de la qualification du jeu vidéo par la jurisprudence maintenant que la loi N 2012-309 du 5 mars 2007 donne une définition du médium comme étant un “logiciel de loisir mis à la disposition du public sur un support physique ou en ligne intégrant des éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou plusieurs utilisateurs une série d’interactions s’appuyant sur une trame scénarisée ou dans des situations simulées et se traduisant sous forme d’images animées, sonorisées ou non”.
Le choix est alors le suivant :
- soit conférer au jeu vidéo une qualification unitaire : œuvre audiovisuelle (donc de collaboration) ou logiciel (œuvre collective), solution simple et sécurisante ;
- soit éclater les différentes composantes de cette œuvre complexe qu'est le jeu vidéo et donner à chacune la qualification qui leur convient, solution plus originale et réaliste.
Selon les décisions, telle ou telle qualification est retenue. Ainsi en 1999, la Cour d'appel de Versailles avait qualifié le jeu vidéo d'œuvre collective. Puis en 2004, dans une approche radicalement inverse, la Cour d'appel de Paris décide de qualifier le jeu vidéo d'œuvre de collaboration. Selon la qualification choisie, le régime diffère complètement.
Dans un récent arrêt du 20 septembre 2007, la Cour d'appel de Paris, en délaissant les qualifications unitaires possibles, opte pour la solution originale : la qualification distributive (ou pluraliste) du jeu vidéo.
Le litige, qui avait pour objet l'introduction de musiques dans des jeux édités par la société CRYO, portait sur la question de savoir si l'introduction sans autorisation préalable et sans paiement des droits à la société SESAM, société de gestion collective des droits d'auteurs d'œuvres multimédia, portait ou non atteinte aux droits d'auteur de celle-ci.
La réponse à cette question dépend bien entendu de la qualification donnée au jeu vidéo.
La société CRYO soutenait que le jeu était une œuvre collective, c'est-à-dire selon l'article L. 113-2 du CPI : « l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé ».
Deux façons de prouver qu'une œuvre est collective : soit elle l'est réputé de droit , soit son mode d'élaboration répond à la définition légale.
Un logiciel étant de par la loi une œuvre collective, la tentation est grande de réduire un jeu vidéo à sa composante logicielle. Mais selon la Cour d'appel "une telle qualification apparaît bien réductrice alors que, s’il est exact que le jeu vidéo comprend un tel outil, il s’agit d’une œuvre de l’esprit complexe élaborée au moyen de cet outil avec un scénario, des images, des sons, des compositions musicales, etc. ; que les dispositions de l’article L. 131-4 5 du Code de la propriété intellectuelle ne sont donc pas applicables, les jeux vidéo édités par la société CRYO étant des œuvres “multimédia” qui ne se réduisent pas au logiciel qui permet leur exécution".
"Complexe", le mot est lâché et conséquence immédiate : le régime du logiciel ne peut englober la complexité artistique d'un jeu vidéo.
Secundo, le mode d'élaboration du jeu vidéo ne répond pas non plus à la définition légale de l'œuvre collective. Pour la Cour d'appel, " les droits de reproduction revendiqués par la société SESAM portent sur les compositions musicales des adhérents de la SACEM en tant qu’elles sont reproduites dans un programme multimedia, qu’en effet la musique ne se fond pas dans l’ensemble que constitue le jeu video, qu’il reste possible d’attribuer au compositeur ses droits d’auteur distincts sur cette œuvre qui, par rapport à ce dernier, est une œuvre de collaboration au sens des articles L. 113-2 et L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle".
Ainsi, comme la fusion de la musique dans l'œuvre n'est pas constatée, c'est le régime général des œuvres plurales qui doit être appliqué : le régime de l'œuvre de collaboration régi par l'article L 113-3 du CPI : "L’œuvre de collaboration est la propriété commune des coauteurs. Les coauteurs doivent exercer leurs droits d’un commun accord, chaque auteur partage donc les droits sur l’œuvre finale; toutefois lorsque la contribution des auteurs relève de genres différents, chaque coauteur peut, sauf convention contraire, exploiter séparément sa propre contribution à condition de ne pas porter préjudice à l’exploitation de l’œuvre commune".
Par conséquent, l'autorisation préalable pour l'utilisation de musiques doit être demandée à l'ayant-droit, en l'espèce la SESAM.
Pour conclure, on peut s'interroger sur les réponses apportées à la question de la qualification du jeu vidéo par la jurisprudence maintenant que la loi N 2012-309 du 5 mars 2007 donne une définition du médium comme étant un “logiciel de loisir mis à la disposition du public sur un support physique ou en ligne intégrant des éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou plusieurs utilisateurs une série d’interactions s’appuyant sur une trame scénarisée ou dans des situations simulées et se traduisant sous forme d’images animées, sonorisées ou non”.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire